Dernièrement Lakaa a eu le plaisir d’organiser deux webinars sur un sujet on ne peut plus actuel : la CSRD. Grâce au regard d’expert de Marena Eirich, directrice du pôle conseil au sein du cabinet Des Enjeux et des Hommes et au témoignage d’Alexis Papon, Directeur RSE d'Elior, nous avons pu présenter les grandes lignes de cette directive et les implications pour les entreprises déjà et bientôt concernées. Pour diffuser au plus grand nombre leur regard d’expert, vous trouverez dans cet article une synthèse des éléments à retenir. Pour aller plus loin, vous pouvez également visionner le replay du webinar.
Dans ce premier article vous trouverez une présentation globale de la directive et ses implications pour les entreprises, présentée et expliquée par Marena.
Remise en contexte, pourquoi la CSRD ?
La directive s’inscrit dans un mouvement plus global : le Pacte Vert au niveau européen. Elle a pour principal objectif de renforcer la fiabilité et d’harmoniser les reporting ESG. Une des principales conséquences visées est d’orienter au mieux les flux financiers vers les entreprises qui portent la transition. Une meilleure transparence ainsi qu’un meilleur reporting semblait nécessaire car très souvent remis en question jusque là.
Tour d’horizon
La CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive) vient remplacer la NFRD (Non financial reporting directive) ou DPEF en français, avec pour finalité une transmission des rapports de durabilité des entreprises à L’ESAP (European single access point), une plateforme numérique qui permettra un meilleur accès de la part des marché financier aux reporting des entités concernées.
Qui s’occupera de la certification ?
Les commissaires aux comptes, mais aussi avocats, experts-comptables et OTI dont l'accréditation sera fournie par la COFRAC.
Et quelles sont les sanctions en cas de manquement ?
En fonction du type de manquement la sanction peut varier, en France elle est décrite en détail sur le Portail RSE.
Rentrons dans le vif du sujet
Point vocabulaire utile pour la suite
- Matériel → ce qui va être déterminé comme pertinent pour les entreprises.
- IRO : Impact, risque et opportunités associés
L’analyse de Double matérialité
Quelques définitions d’abord :
La CSRD intègre elle le concept de la double matérialité, les entreprises sont tenues de fournir les informations suivantes :
- La matérialité financière ne prend en compte que les impacts positifs et négatifs générés par l’environnement économique, social et naturel sur le développement, la performance et les résultats de l’entreprise.
- Pour la matérialité d’impact ce sont les impacts négatifs ou positifs de l’entreprise sur son environnement économique, social et naturel qui sont à prendre en compte.
Cette analyse de double matérialité est obligatoire, dans la mesure où elle représente le cœur de la CSRD. C’est un travail indispensable pour savoir sur quels éléments se pencher et travailler en tant qu’organisation. En tant que directive généraliste, elle s’adresse à un très grand nombre d'entreprises qui plus est de tous les secteurs, cette analyse permet donc de se focaliser sur ce qui est essentiel ou “Matériel” et de faire un tri.
Dit autrement, l’entreprise doit communiquer seulement les informations pertinentes (relatives à son activité et son entreprise). C’est l’analyse de double matérialité qui détermine les thématiques qui devront être prises en compte et publiées dans le cadre du reporting par l’entreprise.
Dans la CSRD, l’entreprise doit élaborer et divulguer un plan d’action répondant aux IRO qu’elle a identifiées. La méthodologie est encore libre, mais l’EFRAG a publié des “implementation guidance” notamment sur la double matérialité pour permettre aux entreprises de s’orienter.
Focus sur les ESRS
Definition : European Sustainability Reporting Standards
Une première distinction à noter, les normes se divisent en deux catégories :
LES NORMES TRANSVERSALES
ESRS 1 - Exigences générales
Aucune action obligatoire dans ce cas, seulement une description générale de la CSRD afin de comprendre son architecture.
ESRS 2 - Information générales (Obligatoires)
Tout ce qui est obligatoire pour les entreprises se trouve dans cette section : de la double matérialité, à l’analyse des IRO dans la chaîne de valeur au plan d’action prévu par l’entreprise pour répondre à ces mêmes IRO.
LES NORMES THÉMATIQUES
Au nombre de cinq pour l’environnement, de quatre sur le plan social et un au niveau de la gouvernance. Il y a en tout plus de 80 sujets thématiques à analyser afin d’identifier les liens avec l’entreprise.
Rentrons encore un petit peu plus dans le détails avec le sujet des DATA points.
Chaque ESRS comporte des DR (Disclosure Requirements), qui sont les informations spécifiques que les entreprises peuvent être tenues de divulguer. Pour cela, elles doivent collecter et présenter des données sous plusieurs formes, également appelés "data points". Il y en a un peu plus de 1100, environ 150 sont obligatoires et qui peuvent être des données narratives, semi-narratives, des pourcentages ou des données monétaires. Les data points sont disponibles sous forme excel, n’étant pas encore validés définitivement.
Pour plus d’information : EFRAG IG 3 List of ESRS datapoints et une note explicative.
L’importance de la chaîne de valeur
La chaîne de valeur de l’entreprise est également un élément essentiel à prendre en compte lorsqu'on évoque le sujet CSRD. Pour les entreprises assujetties, il faudra identifier les IRO dans la chaîne de valeur, là encore une implementation guidance est disponible pour s’orienter.
En quoi Lakaa peut vous aider ?
Lakaa n’est pas un outil de reporting purement lié à la remontée de données CSRD, Lakaa n’aide pas par défaut à remplir la CSRD. Mais Lakaa peut aider à consolider le rapport CSRD puisque la plateforme fournit des informations du terrain particulièrement intéressantes pour les entreprises définissant lors de leur matrice de matérialité des enjeux liés aux actions locales.
Plus concrètement, prenons l’exemple d’une chaîne de magasins de bricolage qui souhaitent promouvoir l’économie circulaire. Si les personnes sur le terrain, déclarent via la plateforme le nombre exact de produits réparés chaque mois, cela permettra à l’entreprise de valoriser ces actions et d’inclure au reporting des données fiables et mesurables dans le temps.
Une fois que l’on sait tout ça, comment s’organiser ?
En fonction de la maturité de l’entreprise sur les sujets ESG, l’appréhension du projet peut s’avérer très différente, ces cinq grandes étapes permettent néanmoins d’appréhender sereinement l’essentiel des défis :
1. Sensibilisation
Engager son CODIR sur la nécessité de la mise en conformité et déterminer quels pourraient être les risques et opportunités pour l’entreprise, sans oublier de mentionner les ressources requises à ce type de projet.
2. Projet CSRD
Mettre en place une équipe projet, pilotée par une personne acculturée aux sujets RSE, si besoin ne pas hésiter à se former, c’est un sujet nouveau et complexe et les formations se multiplient au vu du besoin.
3. Analyse de double matérialité
Se lancer dans l’identification & cotation des IRO afin de déterminer lesquels sont matériels pour l’entreprise et mettre en place la feuille de route avec objectifs et métriques.
4. Feuille de route RSE
Adapter ou bâtir une stratégie RSE avec une gouvernance pour déployer la feuille de route.
5. Rapport de durabilité & certification
Pour de nombreuses entreprises déjà soumises à la DPEF, un “Gap analysis” peut être réalisé pour faire l’état des lieux et permettre de se focaliser sur les “écarts” entre ce qui était mis en place jusque là et ce qui sera exigé pour la CSRD. Sans oublier d’engager un maximum de parties prenantes tout au long du processus
Quels types de profils impliquer ?
Tout d’abord, il convient d'impliquer les services concernés par les sujets ESG comme par exemple les RH, la DAF, les achats, le commercial etc, puis impliquer les personnes motivées. En fonction des critères ESG, il faut déterminer qui sera spécialisé sur quelle partie. (Partie Collaborateurs = RH, Partie chaîne de valeur = Achat, etc). En tant que projet engageant l’entreprise dans sa globalité, un grand nombre de personnes peut être mobilisé sur plusieurs mois d'affilée.
Pour conclure, la CSRD contrainte ou opportunité ?
C’est une législation exigeante qui demande un effort certain en ressources et en temps, que cela soit fait entièrement en interne ou en faisant appel à une aide extérieure. Le risque de non-conformité est évidemment à prendre en compte, les sanctions et l’influence sur la réputation de l’entreprise n’étant pas à négliger.
Pour capitaliser au maximum sur les efforts déployés, mieux vaut voir cette nouvelle donne comme source d’opportunités. Premièrement pour bâtir ou revoir sa stratégie RSE, mais aussi pour déployer un nouvel avantage compétitif en aidant vos clients à entrer en conformité. Sans oublier que c’est également l’occasion de mobiliser en interne autour d’un projet commun, voire d’engager les parties prenantes dans une relation d’un nouveau type.
Pour le bien de l'entreprise, il faut surtout éviter à tout prix que la CSRD fasse l’objet d’une transition subie, cela mettrait à mal le potentiel de transformation bénéfique qu’elle est supposée apporter.